Naissance et évolution du concept de baroque
Le terme « baroque » vient du portugais « barroco » qui signifie de forme irrégulière à propos d'une perle, d'une pierre. (Toutefois le substantif barroco désigne d'abord un gros rocher à la rondeur irrégulière, ou encore un fossé, un ravin ; dans les deux cas, le terme semble contenir une idée d'irrégularité).
Le terme « baroque » dans son sens actuel, comme la plupart des périodes ou désignations stylistiques, a été inventé postérieurement par la critique d'art et non par les praticiens des 17ème et 18ème siècles. Ceux-ci ne se pensaient pas baroques mais classiques. Ils utilisent les formes du Moyen Âge, les ordres classiques, les frontons, toute une modénature classique issue des modèles gréco-romains. Le baroque est né à Rome à la fin 16ème siècle. En français, le terme est attesté dès 1531 à propos d'une perle, à la fin du 17ème siècle au sens figuré.
En 1694 (en pleine période baroque donc), le mot, pour l’Académie française « se dit seulement des perles qui sont d’une rondeur fort imparfaite. Un collier de perles baroques ». Près d’un siècle plus tard, en 1762, alors que le baroque s’achève, outre sa première signification, et toujours selon la même Académie, « il se dit aussi au figuré, pour irrégulier, bizarre, inégal. ». Au 19ème siècle, pour la sixième édition de son dictionnaire, l’Académie inverse l’ordre des définitions : les perles passent au second rang et le sens figuré au premier. C’est en 1855 que, pour la première fois, le mot est utilisé pour décrire la période et l’art succédant à la Renaissance sous la plume de l’historien d’art suisse Jacob Burckhardt dans Le Cicerone. Ce n’est pas un hasard si c’est dans le monde allemand que naît cette acception du mot, les Français et les Anglais disposent de leurs rois pour décrire l’évolution des styles alors qu’à l’époque, l’Allemagne est divisée en une myriade de micro-États, le Kleinstaaterei.
Il faut attendre une génération et 1878 pour que le « style baroque » fasse son entrée dans le Dictionnaire de L’Académie française et que la définition perde un peu de son caractère dépréciatif. Il est vrai que l’impératrice Eugénie a remis au goût du jour les mignardises et le style Louis XV et qu’est né, ce que nous appelons le néobaroque: la réhabilitation peut commencer et Wölfflin écrire son œuvre pour nous éclairer sur ce qu’est ce baroque si complexe, tourmenté, irrégulier et, au fond, plus fascinant que bizarre…
L’historien d’art d’origine suisse Heinrich Wölfflin (1864–1945) Renaissance et Baroque définit le baroque comme un « mouvement importé en masse », un art antithèse de l’art de la Renaissance. Il ne fait pas de distinctions entre le maniérisme et le baroque, ce que font les auteurs modernes, et il ignore sa phase plus récente, le rococo qui s’épanouit dans la première moitié du 18ème siècle. En France et en Grande-Bretagne, son étude n’est prise au sérieux qu’à partir de l’influence prédominante que Wölfflin acquiert au sein de l’école germanique.
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